Rapport Auclaire intégral (source CNC)


dimanche 8 février 2009

B.II • 2 • Faut-il réglementer les festivals de cinéma ?

Extrait du rapport "Par ailleurs, le cinéma est un divertissement...
propositions pour le soutien à l’action culturelle dans le domaine du cinéma"
| Alain Auclaire Novembre 2008 |

Le rapport rédigé en 2005 par M. Michel Berthod, Inspecteur général des affaires culturelles, sur la question de la diffusion non commerciale du cinéma comporte des recommandations en ce qui concerne les festivals. Il préconise notamment que les festivals fassent l’objet d’une habilitation administrative. Selon cette proposition, l'habilitation serait délivrée par le préfet de région, après consultation d'une commission dans laquelle siégeraient des représentants des élus, des professions cinématographiques, ainsi que des opérateurs culturels de la région.

La commission devrait se prononcer sur un ensemble de critères. D'abord sur les films, pour prendre en compte notamment la programmation de films inédits en France ou de films de répertoire. Les autres critères pourraient porter sur la contribution apportée au cinéma français ou aux échanges culturels internationaux, sur la qualité des lieux de projection, sur la présence de membres des équipes des films sélectionnés, sur l'insertion dans une politique d'éducation artistique et d'action culturelle, sur les relations avec les exploitants locaux, ou enfin sur la politique tarifaire et l'équilibre financier du festival. Il n’est en revanche préconisé aucune condition relative au statut juridique de l'opérateur du festival.

Chacune de ces suggestions mérite examen. Toutefois, la proposition ne semble pas applicable dans son ensemble à l'organisation des festivals de cinéma, qu'il s'agisse de leurs opérateurs ou des différents partenaires concernés. La plupart des conseillers cinéma en DRAC ont fait observer qu'ils ne disposaient pas des moyens de gérer une telle procédure d'habilitation, compte tenu du nombre important de manifestations susceptibles d'être concernées dans presque toutes les régions. Par ailleurs l'imposition de contraintes de programmation risque de freiner la recherche de films de cinéastes réputés difficiles ou marginaux et de cinématographies exotiques. Quant à la relation avec les exploitants locaux, elle est naturelle lorsque l'exploitant s'investit directement dans l'organisation de la manifestation ; elle est impossible s'il existe une situation d'affrontement local, et il serait alors contre-productif de l'imposer. De plus beaucoup de manifestations sont certes conçues comme des évènements exceptionnels, mais font partie intégrante de la politique d'animation culturelle d'un cinéma et de sa recherche de nouveaux publics.

C'est pourquoi, plutôt qu'un régime d'habilitation administrative, il serait utile de mettre à l'étude des règles relatives aux conditions de diffusion des films dans les festivals et à l'accueil du public. On pourrait ainsi identifier trois situations :
  • Le festival fait partie de l'activité de la salle et en suit la réglementation, notamment en ce qui concerne la recette et la fiscalité.
  • Le festival est accueilli dans des salles normalement autorisées, mais qui bénéficient d’une dérogation aux règles habituelles, soit en raison de la participation d'autres lieux non autorisés, soit en raison de la programmation de films sans visa, soit pour d'autres raisons techniques. Les salles intéressées ne sont alors pas soumises à leurs obligations courantes de déclaration, ce qui interdit de faire entrer ces résultats dans les statistiques et surtout dans le règles habituelles de partage de la recette et de cotisation au compte de soutien. S'agissant de séances exceptionnelles, on pourrait sans doute appliquer un régime de déclaration simplifiée. Celui-ci pourrait être inspiré de ce qui a été mis en place par le CNC pour les séances en plein air, et conditionné à l'accord préalable du distributeur et un nombre de séances limité à deux par film. Une telle opération continuerait à ouvrir le cas échéant l'accès à une aide du ministère ou du CNC comme c'est déjà le cas.
  • Le festival sort des cadres habituels de la réglementation cinématographique, à cause de son importance exceptionnelle, ou d'un contenu spécifique (par exemple parce qu'il inclut des œuvres de "video-art"). Il doit être alors traité comme toute autre manifestation culturelle bénéficiaire ou non d'une aide publique, selon des critères qui ne relèvent pas de la diffusion cinématographique.